ASTRIA et Vous n°14 > Mars 2007

> La procédure de saisie immobilière

La réforme de la procédure de saisie immobilière est entrée en vigueur le 1er janvier 2007. À cette occasion, nous vous proposons un panorama de cette procédure incluant les dernières modifications.

La réforme de la saisie immobilière modifie les articles du code civil et retient cinq grands principes :

  • Instituer un socle commun de toutes les procédures d’exécution ;
  • Garantir l’équilibre entre les droits du débiteur et les intérêts de ses créanciers en renforçant le rôle du juge et en maintenant la représentation obligatoire par un avocat ;
  • Responsabiliser le débiteur en l’autorisant à procéder à la vente amiable de son bien ;
  • Sécuriser la procédure en imposant des garanties de paiement aux acquéreurs du bien saisi ;
  • Simplifier et accélérer la procédure en limitant les contestations et en anticipant la procédure de distribution du prix de vente ;

Les départements d’Alsace et Moselle, qui bénéficient d’une procédure de saisie des biens spécifique sont exclus de cette réforme.

La procédure de saisie immobilière

La procédure de saisie immobilière relève de la compétence du juge de l’exécution du tribunal de grande instance dans le ressort duquel est situé l’immeuble saisi. Dans le cas où plusieurs immeubles d’un même débiteur seraient saisis simultanément, la procédure se déroule dans le ressort duquel est situé l’immeuble saisi où demeure le débiteur. À défaut, elle se fait devant le juge du ressort dans lequel est situé l’un des immeubles appartenant au débiteur.

La procédure de saisie est engagée par la signification du commandement de payer valant saisie. Le débiteur est tenu de prendre un avocat, tout comme le ou les créanciers.
La contestation de la saisie par le débiteur ne suspend pas le cours de la procédure.

Les formalités tendant à la saisie de l’immeuble

Le commandement de payer valant saisie est notifié au débiteur, à la requête du créancier poursuivant.
Le commandement indique les coordonnées de l’avocat du créancier poursuivant, celles du juge de l’exécution, la date et la nature du titre exécutoire, le décompte des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus, le taux des intérêts moratoires et la désignation du bien sur lequel porte la saisie. Également, le commandement précise que l’immeuble est saisi et qu’il devient de fait indisponible à l’égard du débiteur, de même que les fruits (les sommes provenant de la location du bien par exemple), dont le débiteur devient le séquestre. Concernant l’huissier de justice, le commandement prévoit qu’il pourra pénétrer dans les lieux afin de dresser un procès-verbal de description de l’immeuble et qu’il obtiendra du débiteur, lorsque le bien fait l’objet d’un bail, les coordonnées du locataire.
Le commandement indique aussi que le débiteur qui en fait la demande peut bénéficier de l’aide juridictionnelle s’il remplit les conditions prévues et qu’il a la faculté, s’il s’estime en situation de surendettement, de saisir la commission de surendettement.
Enfin, le commandement rappelle que le débiteur doit payer les sommes indiquées dans le délai de huitaine et qu’à défaut de paiement, la procédure à fin de vente se poursuivra. Il sera assigné à comparaître, à cette fin, à une audience devant le juge. Le commandement précise toutefois que le débiteur garde la faculté de rechercher un acquéreur ou de donner mandat à cet effet pour procéder à la vente amiable de l’immeuble saisi, la vente ne pouvant être conclue qu’après autorisation du juge.

Les effets du commandement de payer valant saisie

À moins que son expulsion soit ordonnée, le débiteur conserve l’usage de l’immeuble saisi, sous réserve de n’accomplir aucun acte matériel susceptible d’en amoindrir la valeur. Il s’expose, dans le cas contraire, à être condamné à verser des dommages et intérêts au créancier, voire à des poursuites sur la base de l’article L. 314-6 du code pénal.
À l’expiration d’un délai de huit jours à compter de la signification du commandement de payer valant saisie, et à défaut de paiement, l’huissier de justice peut pénétrer dans les lieux et dresser un procès-verbal qui comprend la description des lieux (composition et superficie), l’indication des conditions d’occupation et l’identité des occupants, le cas échéant l’adresse du syndic de copropriété, et tous autres renseignements utiles sur l’immeuble fournis par l’occupant.

L’assignation à comparaître

Dans les deux mois qui suivent la publication du commandement au bureau des hypothèques, le créancier poursuivant assigne le débiteur saisi à comparaître devant le juge de l’exécution à une audience d’orientation. L’audience a pour objet d’examiner la validité de la saisie, de statuer sur les contestations (par exemple sur le montant de la mise à prix) et de déterminer les modalités selon lesquelles la procédure sera poursuivie. Si le débiteur n’est pas présent ou représenté, seules les indications fournies par le créancier seront prises en compte et la procédure en vente forcée de l’immeuble se poursuivra.
Le ou les créanciers sont tenus de déclarer les créances inscrites sur le bien saisi en principal, frais et intérêts échus, avec l’indication du taux des intérêts moratoires.
Les débats terminés, le jugement rendu mentionne le montant retenu pour la ou les créances en principal, frais, intérêts et autres accessoires le cas échéant.
Les parties peuvent interjeter appel dans les quinze jours de la notification du jugement.

La vente amiable du bien saisi

La demande tendant à la vente amiable du bien peut être présentée, et jugée, avant la signification à comparaître. Le débiteur doit dans ce cas mettre en cause les créanciers inscrits sur le bien. Dans cette hypothèse, la décision qui fait droit à la demande suspend le cours de la procédure.
S’il n’a pas déjà présenté au juge sa demande de vendre à l’amiable le bien saisi, c’est à l’audience que le débiteur peut le faire, s’il justifie que cette vente peut être conclue dans des conditions satisfaisantes (situation du bien, conditions économiques du marché et diligences entreprises). Cette demande de vente amiable peut être formulée verbalement à l’audience par le débiteur, sans que la présence de son avocat soit nécessaire.
S’il autorise la vente amiable, le juge de l’exécution fixe le montant du prix en deçà duquel l’immeuble ne peut être vendu, eu égard aux conditions économiques du marché ainsi que, s’il y a lieu, les conditions particulières de la vente. Il fixe aussi la date d’audience à laquelle l’affaire sera rappelée, qui ne peut excéder un délai de quatre mois. Ce délai ne pourra être prorogé (pour trois mois maximum) à cette nouvelle audience que si le débiteur justifie d’un engagement écrit d’acquisition et qu’à fin de permettre la rédaction et la conclusion de l’acte authentique de vente.
Pendant cette période, le débiteur doit rendre compte au créancier poursuivant, sur sa demande, des démarches accomplies ou en cours pour la vente amiable du bien. Si tel n’est pas le cas, le créancier peut, à tout moment, l’assigner aux fins de voir constater sa carence et faire ordonner la reprise de la procédure de vente forcée. La décision qui ordonne la reprise de la procédure n’est pas susceptible d’appel.

La vente forcée du bien saisi

Lorsque le juge de l’exécution ordonne la vente forcée, il fixe la date de l’audience à laquelle il y sera procédé, qui se situe dans un délai compris entre deux et quatre mois ; il détermine aussi les modalités de la visite du bien saisi si le créancier le demande. Au jour indiqué, le créancier poursuivant ou, à défaut, tout autre créancier inscrit, sollicite la vente. Si aucun créancier ne la sollicite, le juge constate la caducité du commandement de payer valant saisie. Dans ce cas, le créancier ayant engagé les poursuites conserve à sa charge l’ensemble des frais de saisie, sauf décision contraire spécialement motivée du juge.
Enfin, la vente ne peut être reportée que pour un cas de force majeure ou sur demande de la commission de surendettement. Si la vente est renvoyée à une audience ultérieure, il est procédé à une nouvelle publicité dans les formes et délais de la première vente forcée.

La publicité

La vente forcée est poursuivie après une publicité visant à permettre l’information du plus grand nombre d’enchérisseurs possible. Elle est donc annoncée à l’initiative du créancier poursuivant dans un délai compris entre un et deux mois avant l’audience d’adjudication. À cette fin, le créancier rédige un avis de vente et en assure le dépôt au greffe du juge de l’exécution pour qu’il soit affiché sans délai dans les locaux de la juridiction, à un emplacement aisément accessible au public, et fait procéder à sa publication dans un des journaux d’annonces légales diffusé dans l’arrondissement de la situation de l’immeuble saisi. Cet avis indique les nom, prénom et domicile du créancier poursuivant et de son avocat, la désignation de l’immeuble et sa description sommaire (sa nature, son occupation éventuelle et tous les éléments connus relatifs à sa superficie) ainsi que, le cas échéant, les dates et heures de visite. Il précise également le montant de la mise à prix et les jour, heure et lieu de la vente. L’avis affiché doit être rédigé en caractères dont la hauteur ne peut être inférieure à 40 x 29,7 cm. À la diligence du créancier poursuivant, un avis est également apposé à l’entrée ou, à défaut, en limite de l’immeuble saisi et publié dans deux éditions périodiques de journaux à diffusion locale ou régionale, au tarif des annonces ordinaires.

Les enchères

Ne peuvent se porter enchérisseurs, ni par eux-mêmes, ni par personnes interposées le débiteur saisi, les auxiliaires de justice qui sont intervenus dans la procédure et les magistrats de la juridiction devant laquelle la vente est poursuivie.
Seul un avocat, inscrit au barreau du tribunal de grande instance devant lequel la vente est faite, peut porter les enchères, et il ne peut être porteur que d’un seul mandat. Avant de porter les enchères, l’avocat se fait remettre par son mandant un chèque de banque ou une caution bancaire irrévocable représentant 10 % du montant de la mise à prix. La somme est restituée à l’enchérisseur s’il n’est pas déclaré adjudicataire, c'est-à-dire s’il n’obtient pas le bien.
Les enchères sont arrêtées lorsque trois minutes se sont écoulées depuis la dernière enchère et le dernier enchérisseur devient adjudicataire. Un jugement d’adjudication est alors rendu.

Les effets de la vente forcée

Sauf si une disposition des conditions de vente prévoit le maintien dans les lieux du débiteur saisi, l’adjudicataire peut mettre à exécution le titre d’expulsion dont il dispose à l’encontre du saisi et de tout occupant n’ayant aucun droit, le jugement d’adjudication permettant également l’expulsion.

La surenchère

Toute personne peut faire une surenchère du dixième au moins du prix principal de la vente ; cette surenchère doit être faite dans les quinze jours suivant l’adjudication, par acte d’avocat, et vaut demande de fixation d’une audience de surenchère. La validité de la surenchère peut être contestée dans les quinze jours. Le surenchérisseur par contre ne peut pas se rétracter.
L’audience est fixée par le juge à une date comprise dans un délai de deux à quatre mois suivant la déclaration. Le débiteur saisi, le créancier poursuivant, les créanciers inscrits, l’adjudicataire et le surenchérisseur sont avisés par le greffe de la date d’audience. Le jour de l’audience, les enchères sont reprises comme précédemment, sur la mise à prix modifiée par la surenchère.

La distribution du prix de l’immeuble

Elle est faite à la requête du créancier saisissant ou, du créancier le plus diligent, ou du débiteur. Lorsqu’il n’y a qu’un créancier, celui-ci adresse au consignataire une demande de paiement de sa créance, avec les justificatifs, dans un délai de deux mois suivant la vente. Le consignataire procède au paiement dans le mois de la demande et en informe le débiteur. Le cas échéant, il lui remet le solde.
Si plusieurs créanciers sont concernés par la vente, un projet de distribution est élaboré par la partie poursuivante, puis il est notifié aux créanciers et au débiteur. À l’expiration d’un délai de quinze jours, et en l’absence de contestation ou de réclamation, le juge de l’exécution homologue le projet. À défaut d’accord entre les créanciers, toute partie intéressée peut saisir le juge de l’exécution d’une requête aux fins de distribution judiciaire. Le juge établit dans ce cas l’état des répartitions, puis le consignataire procède au paiement des créanciers et, le cas échéant, du débiteur, dans le délai d’un mois.

 

Textes de référence :